samedi 15 décembre 2007

L'homme et les larmes

"Les garçons ça pleure pas !"

On dit que les hommes, les vrais, ça pleure pas. Et toute l'éducation de nos petits garçons se fait dans ce climat. Est-ce vraiment juste ?

La sensibilité n'est pas l'apanage des femmes, et les psychologues qui parlent de part de féminité en l'homme qu'il faut accepter n'ont rien compris. C'est une simplification grossière. Ce n'est pas la présence ou l'absence de sensibilité qui différencie le féminin du masculin, c'est surtout la façon de gérer cette sensibilité.

Il suffit de regarder les enfants les plus jeunes, ceux qui ne portent pas encore de masque, pour se rendre compte que les petits garçons ne sont pas moins sensibles que les petites filles. Beaucoup de choses les différencient, mais pas ça.

Pour avoir été surveillant (pion comme on dit) dans un collège, j'ai plusieurs fois été témoin des réactions des garçons au cinéma, lors des scènes sentimentales... C'est amusant la façon dont ils éclataient de rire dans ces moments-là, d'une façon tellement exagérée... ils ne riaient pas pour eux, mais pour que les autres les entendent rire, et pour se désimmerger du film. La peur de découvrir (et que l'autre le remarque) qu'ils ont des sentiments que l'éducation condamne.

Et ce ne sont pas les psychologues, malgré l'intention louable au départ, qui vont changer les choses. C'est pas en disant "tu peux pleurer, tu dois accepter ta part de féminité" que ça va faire fléchir les garçons... qui veulent surtout pas ressembler à des filles ! Puisque tout le monde est fait comme ça, ça ne serait pas plus simple d'accepter qu'avoir des sentiments ce n'est ni féminin ni masculin, que c'est juste être humain ?
"Tu peux pleurer, c'est être humain", ça sonnerait mieux quand même pour leurs oreilles...

C'est vrai, lorsque les psychologues ont divisé le monde, ils ont donné aux femmes tout ce qui fait la beauté de l'humain (la sensibilité, la compréhension, la compassion, le don de soi) et aux hommes tout ce qui en fait sa laideur (l'agressivité, le goût pour la destruction). C'est un peu injuste quand même ! Mais c'est surtout archi-faux... Ensuite pourquoi diviser le monde en deux pour vouloir juste après en recoller les morceaux, avec des "tous les hommes ont une part de féminité, et toutes les femmes ont une part de masculinité" ? Quelle est cette étrange schizophrénie de voir tantôt tout en noir et blanc sans nuance, et tantôt tout en gris ?

C'est pourtant le contraire... Hommes et femmes ne sont ni totalement différents, ni totalement semblables...


Alors quel est le lien entre l'Homme au sens noble du terme et le sentimentalisme ?

L'Homme noble peut avoir des larmes. C'est vrai, l'Homme ne pleurniche pas. Il assume. Il a des larmes sans pour autant s'effondrer, sans gémir ou s'apitoyer sur son sort, sans se faire plaindre. Il a des sentiments sans que cela le rende plus faible. Il ne fuit pas le regard des autres quand ses propres yeux sont mouillés, car il ne craint ni ce qu'il est, ni ce que pensent les autres de lui.

Avoir des larmes mais rester grand...

Il n'y a aucun courage à enterrer son coeur ou à l'enfermer dans un coffre-fort. Celui qui le laisse exposé, celui qui se heurte à la vie en surmontant tous ses aléas sans renoncer aux sentiments, celui-là est digne du mot courage.

Les coeurs de pierre ne sont que des carcasses vides, des morts en sursis...

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